dimanche 22 mai 2011

Jewish life in Botosani and around

"Botosani City" et ses 77 synagogues répertoriées dans les archives de la ville. Il n'en reste plus qu'une "en service"...
Shabbes y est célébré tous les vendredis par Gustave Finkel avec un superbe accent ashkénaze et puis on y retourne le samedi matin pour les plus courageux et samedi soir pour la fin du Shabbes.

La synagogue prend place au milieu des blocs communistes sur la place derrière le grand marché. Elle paraît toute petite et comme résistante à son nouvel entourage blanchâtre et un peu sinistre par temps gris. Pour sa part, elle a fait peau neuve, restaurée il y a environ 50 ans et on lui a choisit des couleurs chaudes jaune et rouge pour l'extérieure. Mais je ne m'attarde pas sur la description, voici plutôt quelques images :


L'intérieure date de plus de 150 ans. Les 12 tribus d'Israël sont représentées à la fois dans la grande et la petite salle pour l'hiver (plus facile à chauffer) à l'aide d'illustrations animalières et autres symboles de chaque tribu :
la petite salle :



 
et la grande :





La communauté juive de Botosani regroupe environ 70 personnes mais quand vient le jour de Shabbat, seule une dizaine d'entre eux se rejoignent à la synagogue. Je suis toujours la seule fille et ils m'ont ainsi accepté tout l'hiver dans leur rang, dans la petite pièce au fond près du poil.
En fait, le vendredi soir est plutôt un moment de rencontre afin de partager les histoires de la semaine de chacun, qu'un simple instant de prière traditionnelle. Tout le monde parle pendant l'office et pas toujours à voix basse et on entend souvent des téléphones portables sonner, rien de bien orthodoxe, quoi!
5 personnes parlent encore yiddish dans la communauté et ce fût la première langue de communication pour Jake à son arrivée en octobre alors qu'il ne maîtrisait pas bien le roumain encore. Salomon, qui garde la synagogue et prépare le feu avant chaque Shabbat, continue à nous parler en yiddish quand il nous voit arriver.
En se promenant dans le vieux centre avec mon amie Julie, j'ai remarqué que l'ancienne synagogue devenue un magasin de vente de mobilier, était ouvert pour la première fois, lors de mon passage dans le quartier. Je lui ai ainsi proposé d'y entrer. A l'intérieur, deux jeunes gars était en pause déjeuner et nous ont permis de faire des photos :







...et derrière l'armoire et des piles de bibelots, une peinture murale d'instruments de musique. Bob Cohen de "Di Naye Kapelye" dit avoir vu les mêmes à Iasi dans l'ancienne synagogue. Peut-être est-ce le même peintre ?.. J'avais remarqué une peinture d'instruments de musique à Cernauti/Czenowitz en Ukraine, mais là-bas, les instruments étaient suspendus dans des arbres. Très surréaliste!
Quant aux animaux, ils représentent chacun un mois de l'année, mais l'araignée et les cigognes sont assez surprenantes pour une synagogue. Ce peintre est un fantaisiste, il faut croire...

A Botosani, il y a aussi le grand cimetière juif réputé pour ses pierres tombales joliment ornées. Il a pourtant encore été en partie saccagé il y a seulement 5 ans de cela par un groupe de jeunes soi-disant. La partie ancienne est couverte d'excréments de corneille, freux et choucas. Ces oiseaux s'y sont paisiblement installés et ont fait leur quartier dans les arbres du cimetière à l'abri du brouhaha quotidien de la ville.







 Gustave Finkel au milieu du vieux cimetière.



A l'entrée du nouveau cimetière, un monument "à la mémoire des millions de juifs exterminés durant l'holocauste et du savon R.I.F fabriqué par les nazis à partir des corps exhumés des juifs dans les camps. Se rappeler de l'horreur commise et ne jamais oublier!"
Départ du cimetière. Le gardien brûle les feuilles mortes derrière nous. Fanées et mouillées de larmes, elles tourmentaient nos coeurs. Retour vers la vie avant de nous aussi partir en fumée! Adieu belles cendres, je m'en vais marcher encore un peu sur mon ombre avant que quelqu'un d'autre le fasse à ma place...*

jeudi 7 avril 2011

Retour au point zéro. le 25.03.2011. Bribes de souvenirs du mois passé...

         Alors qu'un cobra s'est échappé du zoo du Bronx à New York, Botosani nous offre enfin son premier vrai jour de printemps. Je reprends la "plume" car enfin s'en est trop. 3 mois ont passé et le monde tombe en morceaux, terres et hommes. C'est l'agitation ici aussi mais différente. Les enfants sont tous dehors sur leur rollers et sur les bancs en petite bande. Les cours n'ont pas eu lieu depuis plus de 2 semaines pour la plupart des écoles, collèges et lycées. Les professeurs n'ont pas été payé un sou pour le mois dernier, alors à quoi bon travailler...! Ils se regroupent devant la mairie tous les matins et font du bruit mais les syndicats ne sont pas très puissants et le cours des choses va reprendre doucement la moitié d'un salaire qui sera passé à la trappe. Eh oui, à faire la grève, le gouvernement grapille ainsi afin de leur payer le mois dernier. Ils ne seront pas payés cet été non plus, ont-ils annoncé. Dorina et Monica cherchent déjà des petits boulots pour compléter. Elles n'auraient jamais pensé devoir faire cela à leur âge. C'est bien triste à voir tout cela...
Les enfants, eux, sont contents et aident leur mère à vendre des fleurs ou bien fument en cachette dans un coin. La vie continue tant bien que mal.
Autour de Botosani et partout dans le pays, les champs sont en feu depuis plus de 3 semaines. Les paysans brûlent leur terre sans contrôle ni limite malgré la loi interdisant ce procédé. Ainsi, sur la route le feu flamblent dans le fossé là tout proche et chauffe la vitre de temps à autre, et ce, nuit et jour.
En Transylvanie, la Palinka réchauffe les coeurs des villageois. Chacun amène ces prunes, pommes, poires ou même fruits de mûrier à la distillerie du village, et passe une bonne partie de l'après-midi jusqu'au soir à préparer son eau-de-vie tant chérie et appréciée, qu'ils offrent à toute personne pénétrant leur âtre aux vapeurs alcoolisées.
"Oy, Romenia", pays des douces folies et des tendres plaisirs...!
Pour mieux faire passer la dure réalité du quotidien de certains, combien de blagues, combien de jeux et d'alcools dans le sang des hommes...
Sur la route pour la Transylvanie, on a été surpris par une tempête de neige dans les Carpates. Ils nous restés plus de 200 kilomètres à faire avant la nuit et il était alors impossible de dépasser les 10km à l'heure. Même dans ces conditions, sur ces petites routes à trous enneigés et verglacés avec des tournants tous les 30 mètres, les voitures nous doublaient sans soucis ni frayeurs, aussi bien en ligne droite qu'en pleins milieu du tournant.
Bref, le calme revenu, voyant maintenant à plus de 2mètres, nous voilà qui admirons les petits villages de Bucovine.C'est un peu comme la suisse mais avec un style bien roumain. Des petites maisons éparpillées dans les montagnes avec quelques animaux et des bottes de foin rassemblés autour d'un pic de bois. Beaucoup de charrettes et de forêt de pins.
On dort à Vatra Dornei, d'où vient la bonne eau "Dorna" et on arrive le lendemain à Cluj pour l'anniversaire de Jake.
Dans la voiture, deux amis à nous, Sarah et Nico. Après quelques jours à Botosani, on commence un petit tour en Transylvanie, c'est comme un nouveau pays. Sarah regrette déjà la Moldavie...
Le soir même, Florin, notre ami violoniste tsigane, vient jouer dans un bar avec son cousin accordéoniste et pendant des heures ils jouent avec Jake le répertoire de Palatka d'où il vient. Csardas lent et rapide, Akasztos, Szokos, etc...tous des danses de couple. Et puis, il y a les danses pour les hommes, les Legénies et Korcsos, lentes et rapides aussi, où ils frappent leur corps de leur mains sur les pieds et autres et sautent partout. C'est assez impressionnant. Pendant ce temps là, les femmes sont en cercle ou en ligne derrière, et lancent à l'improviste des commentaires rythmés, souvent moqueurs, sur la performance de l'homme. Ce sont les mêmes phrases qui reviennent toujours, connus de tous car traditionnelles. En voici un exemple, traduit approximativement :
de la région Sekei :

Hujzad édes muzsikásom                               Joue mon doux et tendre musicien
Megfizetek jövő nyáron                                  Je te payerai l'été prochain
Vagy aratok, vagy kapálok                             Ou bien par la récolte ou bien en binant
Vagy egy éjjel véled hálok                             Ou bien en couchant une nuit avec toi.



Ou encore :

les garçons de Kalaka sont très beaux et dansent bien. Le seul problème avec eux, c'est qu'ils n'ont pas besoin des filles.

Il y en a des bien plus chaud, mais je vais m'arrêter là !

Encore quelques balades dans Cluj et puis on reprend la route après avoir laissé Nico repartir. Sarah est toujours avec nous et on embarque aussi Aline, boursière de la Fullbright comme Jake, elle nous a accueilli à Cluj. A notre tour de l'emmener quelques jours plus tard avec nous chez nos amis à Hausman, près de Sibiu.

Avant de quitter la région de Cluj, on rend visite à la famille de musiciens tsiganes de Sopor : Chandorika et sa femme Maria que nous avions rencontrer à Washington lors d'une fête chez des hongrois il y a presque 3 ans de cela. Après 9 ans à Washington, ils sont rentrés dans leur pays. Chandor, violoniste, fait venir pour l'occasion son beau-fils à l'accordéon que nous prenons au passage à Turda. Il y a aussi Juliu à la contrebasse et deux autres jeunes musiciens tsiganes. Réunis autour de la table dans le salon, Sarah et moi nous écoutons pendant des heures le merveilleux répertoire des musiciens de ce village. Jake joue avec eux de temps à autre.


Nous, on parle avec Maria, qui ne joue pas mais danse et nous fait visiter sa cuisine et les bons petits plats qui y mijotent. On fait une balade avec elle au coucher du soleil, les enfants du village nous suivent. C'est la gadoue parterre mais c'est agréable. Maria est belle comme tout et toute la maisonnée rayonne de chaleur en cette douce après-midi de mars. On reprend les bras chargés de Zacouska et confitures et le coeur bien réchauffé...


Sur la route le lendemain avec Sarah et Aline cette fois, on prend un petit chemin en terre escarpé et encore un peu enneigé pour se balader dans les gorges de Turda. Seuls au milieu de ces rochers à l'état brut et vertigineux, on marche sur l'étroit chemin qui longe les rochers d'un côté et tombe à pic sur la rivière de l'autre. Aline n'est pas rassurée et les ponts en bois n'aident pas, d'autant qu'on croise une plaque sur un rocher en hommage à un mort tombé du gros caillou. Je crois que c'est un mur d'escalape pendant l'été. A cette heure de l'année, c'est bien désert et les ours sortent de leur hibernation.
C'était magnifique! Regardez :
 Là où il y a la neige, c'est le chemin entre rocher et fossé...



Cette cascade de glace nous a arrêté. Impossible de la traverser. C'était déjà très beau et magique. Un peu de suspens et de mystère à suivre cet étroit pass où l'on ne sait pas où il vous mène...

Sur le détour pour nous mener aux gorges, j'ai oublié un beau moment. Une ferme sur le côté gauche de la route avec des brebis et des chèvres et leurs bébés nouveaux-nés. Aline demande à s'arrêter. Un agneau voit le jour sous nos yeux, un autre vient de sortir mais il est mort-né. Il a l'air prématuré. La vie et la mort qui se croisent. Le jeune fermier arrive et nous met des bébés dans les bras. Il prend l'agneau mort, sans doute pour donner au chien. Ca me rappelle le Puget et la Borie d'Espinet où les chevreaux tétaient mes lobes d'oreille et où on jouait à s'asperger du lait des brebis comme des pistolets.






Belle journée qui se termine avec notre arrivée à Hausman, chez Johann et Gabi et leurs 2 enfants Noa et Aaron (je suis pas sur de l'orthographe).La suite au prochain numéro...sinon, je finirai jamais sur ce mois-ci!

dimanche 9 janvier 2011

*Merveilleux Réveillon*

[Petite histoire preliminaire] :

De retour à Botosani le 30 décembre à 7h du matin après 10h30 de train de nuit assis dans un compartiment complet avec 6 personnes, nous sommes allés directement au lit pour quelques heures. La vieille dame à côté de moi dans le train a passé la nuit à tourner dans tous les sens, la pauvre, elle devait avoir mal. La plupart du temps, elle était à moitié sur mon siège mais après quelques heures, elle a tout simplement pris mes jambes d'un seul coup, les a étiré le long de son siège sur ces genoux, a posé sa tête sur ma hanche et a glissé ses mains entre mes cuisses, comme un oreiller. Cela s'est fait tellement naturellement qu'après quelques minutes où je me sentais un peu tout chose, j'en ai pris mon partie et me suis allongée à mon tour sur les jambes de Jake. Je n'ai pas vraiment pu dormir car j'avais des fourmis dans les pieds et un radiateur qui soufflait dans mes mollets. Et puis, je n'osais pas bouger pour la dame qui dormait mais au moins, je me suis bien reposée.
Bref, la petite histoire passée, le réveillon est arrivée et nous sommes partis avec notre ami Marcel et son frère pour rejoindre le village de Vorona, à une dizaine de kilomètres, voir les fêtes traditionnelles durant l'après-midi du 31 décembre. La route est bonne jusqu'au "City Hall" du village puis brusquement, c'est le retour des trous, des bosses et de la neige-verglacée, même à 10km/h, ça secoue beaucoup!
Là, sur une scène, d'abord des enfants puis des adultes déguisés soit en ours, soit en tsigane, certains en militaire, d'autres en chèvre ou chevreuil, ou encore en paysans moldaves et cavaliers à cheval, dansaient et chantaient accompagnés par quelques musiciens derrière (2 trompettes, 2 clarinettes, trombone et percussion).

C'est toute une histoire dont je n'ai pas encore bien compris les détails mais en tout cas, il est toujours question d'un ours en captivité par les tsiganes (dont pour certains c'était le métier il y a de nombreux siècles : montreur d'ours, comme les troubadours de chez nous, non ?) qui est parfois tué, puis ressuscite libre ou bien est libéré directement par un autre personnage ou les tsiganes eux-mêmes. J'ai pas bien compris. Les autres moments et personnages récurrents sont la danse des cavaliers dont les chevaux sont différents dans chaque village : décorés avec des perles ou bien des miroirs, avec ou sans queue, etc...



et les personnages masqués (le confectionneur est un personne célèbre du village et il fabrique des flûtes aussi! ) dont voici la danse :





Dans la rue, c'est la fête ! Partout, les gens sont déguisés et dansent et chantent pour se réchauffer car il faisait sacrément froid, autour de -10°C ! Je ne sais pas comment les musiciens arrivaient à jouer sans gants. Peut-être avec beaucoup d'alcool...
Les grands cortèges de mondes fabuleux et masqués ont continué le lendemain encore à Botosani. On pouvait entendre des clochettes toute la journée que les enfants transportent partout durant les fêtes pour éloigner les mauvais esprits. Les enfants viennent aussi chez vous pour vous chanter une "colinde" (chanson de noël) et le 1er janvier, si vous leur ouvrez la porte, ils jettent des grains de riz ou autres et lancent un message de bénédiction pour la maison et votre famille. En retour, quelques pièces ou petites gâteries sont les bienvenues.
Voilà pour les fêtes d'hiver ! Du moins, ce qu'on a pu en voir. Encore quelques photos de la rue et puis, c'est le départ en charrette. 
                  La Multi Ani!                          
  






Notre ami Marcel (à droite de Jake) fait du stop pour rentrer à Botosani avec Eliad, un ami à lui. On est tous rentré ensemble et on a mangé à la maison avant de sortir pour les feux d'artifices fait par chacun dans la rue, bouteille d'alcool à la main, champagne pour les plus chanceux. Et c'est parti pour la nuit..*